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Pierre Jovanovic

Anne-Marie Bruyant

agrégée de lettres classiques


L'Explorateur de l'Au-delà


Nouvelle Version Annotée



I N T E M P O R E L





Le jardin des Livres

Paris



Du même auteur :


Avec Anne-Marie Bruyant ( disponible ) : « Enoch, Dialogues avec Dieu et les Anges » Editions Le Jardin des Livres. www.jardindeslivres.com/09enok1.htm


Disponible : « Enquête sur l'Existence des Anges Gardiens, 600 pages » Editions Le Jardin des Livres. Site Anges : www.frenchpress.com/fra

Chapitres : www.jardindeslivres.com/03anges1.htm


Disponible : « Le Prêtre du Temps » Roman. Editions Le Jardin des Livres. 15 chapitres en ligne : www.jardindeslivres.com/02amon1.htm


Disponible : « Biographie de l'Archange Gabriel »

Editions Le Jardin des Livres. Chapitres en ligne : www.jardindeslivres.com/05gaby1.htm


Ces livres peuvent être commandés chez votre libraire ou chez l'éditeur.



www.lejardindeslivres.fr



« L'Explorateur de l'Au-delà »

Nouvelle Version, Traduction et Commentaires :

© 2004 Le jardin des Livres ®

243 bis, Boulevard - Paris 75008




ISBN 2-914569-13-0 EAN 8782-914569-132






Toute reproduction, même partielle par quelque procédé que ce soit, est interdite sans autorisation préalable. Une copie par Xérographie, photographie, support magnétique, électronique ou autre constitue une contrefaçon passible des peines prévues par la loi du 11 mars 1957 et du 3 juillet 1995, sur la protection des droits d'auteur.



Préface

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L'âme contemplant son corps dans les bras de Demi Moore (hors champ), dans le

film Ghost. Ici, Patrick Swayze pourrait être Franchezzo découvrant qu'il est mort,

bien que se rendant compte qu'il est vivant puisque capable d'observer son corps...

Photo : Studio Paramount Pictures, 1990


Avant d'être un livre majeur de spiritualité, L'Explorateur de l'Au-delà est surtout un incroyable résumé d'informations qui ont même la particularité étonnante d'être parfois en avance sur leur temps1.


La puissance de cette oeuvre littéraire étonne autant par son début que par son développement, inattendu, richissime et laissant perplexe, tant les scènes décrites dépassent l'entendement mais confirment au passage certains points que la littérature des « expériences aux frontières de la mort» lancée par le Dr Raymond Moody en 1974 nous a permis de découvrir.


Ici, nous avons Sir Farnèse, un sujet de Sa gracieuse Majesté, un médium comme les aimait Victor Hugo, saisi par une présence, un esprit nommé Franchezzo qui veut lui raconter sa vie. Du coup, au lieu d'une biographie classique qui commence à la naissance, l'histoire commence là où les biographies normales se terminent : dans un tombeau !

Ce génial artifice littéraire a laissé depuis des traces chez bien d'autres écrivains ( Robertson Davies2 dans son livre Murther & Walking Spirits3  en a fait un usage intense ) y compris français, comme par exemple Jacques Attali4 dans Le Premier jour après moi ou dans la Vie Interdite de Didier Van Cauwalaert5, tous curieux de connaître la réaction de leur entourage à l'annonce de leur mort6. On ne s'étonnera donc pas d'apprendre que L'Explorateur de l'Au-delà ait aussi donné naissance à trois films majeurs, Ghost, Sixième Sens, et surtout Au delà des rêves7, qui examine en détails ce qui se passe de « l'autre-côté ».


Pourtant, l'Explorateur de l'Au-delà n'est pas une extension de la Divine Comédie de Dante mais bien une version surnaturelle du Bel Ami de Maupassant : le lecteur suit le héros, comme s'il s'agissait de lui-même, dans la progression de cette âme qui se réveille au bas de l'échelle spirituelle, à quelques centimètres de son cercueil. Cela peut aussi être l'histoire de chaque âme. Nous assistons, impuissants, au désespoir du personnage qui, malgré ses cris, n'arrive pas à se faire entendre de sa bien-aimée alors qu'elle vient fleurir son tombeau, exactement comme Patrick Zwayze parlant à l'oreille de Demi Moore dans le film Ghost. Nous suivons sa lente évolution en ces royaumes étranges où « les innombrables maisons du Père » se comptent manifestement par millions et dont certaines semblent être aussi dangereuses que les quartiers les plus mal famés de New York jusqu'aux batailles « cosmiques » entre Anges et Démons. Ici toutefois, et contrairement à Ghost, ce n'est plus l'argent, ni le pouvoir, qui animent ce héros maupassien mais bien la volonté d'aimer et de réparer ses fautes ( qui ne sont pas celles qu'on croit ). De l'autre-côté semble-t-il, seul le pardon permet manifestement d'avancer.


Ce livre a aussi un autre avantage ( ou inconvénient ) : en nous plaçant au seuil de notre propre mort, nous sommes forcés de nous dire : « admettons que je sois à la veille de mourir et qu'il existe une vie après la mort, que vais-je découvrir à mon tour, comment cela va-t-il se passer pour moi ? ». Et là, on découvre que la réponse n'est pas toujours très simple. Celui qui a exploré cette question avec une imagination totalement débridée reste l'écrivain américain Philip-José Farmer dans le premier tome de sa série Le bateau fabuleux où il met en scène tous les humains ayant vécu sur Terre se réveillant de la mort au même instant... Pour Franchezzo en revanche, le réveil est immédiat et pas aussi simple que la vision de Farmer : dans son « après-vie » il doit repartir à zéro. Et en même temps, il veut que son amie lui reste fidèle. Difficile à gérer, surtout de l'au-delà, même pour un richissime aristocrate mort. Mais l'amour recèle des forces insoupçonnées...




S'il existe quelques textes français de « A Wanderer in the Spirit Lands » ( le titre original anglais ) aucun éditeur à ce jour n'a réussi à rendre à cette oeuvre littéraire extraordinaire la place qu'elle mérite et cela pour une très raison simple : la traduction réclame trop de temps, bref trop de travail pour retrouver le rythme du livre original en anglais de 1894, et trop de concentration pour lui donner le ton « 2004».

Aussi, Anne-Marie Bruyant et moi-même, nous nous sommes attelés à cette tâche afin de lui donner une nouvelle dimension avec comme seul objectif, être fidèle au rythme et à la fluidité du tourbillon qui a saisi la main du britannique Farnese, mais sans les terribles tournures stylistiques, typiques de la littérature du XIXe siècle dont Orlando8 par exemple est l'un des meilleurs représentants.


En conclusion, L'Explorateur représente le livre le plus grandiose jamais écrit sur le parcours individuel dans l'Au-delà, car, tel un guide Michelin, il nous permettra de ne pas nous sentir totalement perdus et d'éviter ainsi toute crise d'anxiété lorsque nous ferons nos premiers pas de l'autre côté...


Pierre Jovanovic





Franchezzo

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Francesco Farnèse, duc de Parme


Franchezzo est un Italien, sans aucun doute issu d'une ligne secondaire des Farnèse, famille illustre qui a conquis une partie de l'Europe grâce au père fondateur Allessandro Farnèse9 devenu ( avec l'appui de sa soeur Giulia maîtresse du pape Alexandre VI ) le pape Paul III. En étudiant de près la généalogie des Farnèse, on découvre un personnage dont l'histoire personnelle est étonnamment proche de celle racontée dans L'Explorateur de l'Au-delà : dans le cadre d'un mariage de raison, le septième duc de Parme, Francesco Farnèse10 a épousé en 1696 la princesse allemande Dorotea Sofia von Neuburg11 avec laquelle il ne s'entendit guère, ce qui le conduisit dans les bras d'une roturière dont il devint follement amoureux. Et, exactement comme le Franchezzo de ce livre12, le duc Francesco mourut brutalement en 1727 dans les bras de sa bien-aimée. Son frère Antonio Farnèse13 hérita du titre de « duc de Parme » mais à sa mort, la lignée n'ayant pas d'héritier mâle, la branche principale des Farnèse s'éteignit en 1732 et le ducat fut transféré à Charles de Bourbon, fils d'Elisabeth Farnèse14 et de Philippe V.

Franchezzo dit « dès ma plus tendre enfance, j'ai été adoré et encensé par mon entou­rage. J'avais le monde à mes pieds : on m'appréciait car pour tous j'étais « quelqu'un » . Il est donc né en Italie avec une cuiller d'argent dans la bouche car « on donnait des fêtes en mon honneur et je disposais même de courtisans » . Vu l'époque, il s'agit clairement d'un aristocrate. Puis un drame bouleversa son existence, ce qui lui valut une sorte d'exil après lequel il rencontra la « femme de sa vie » à qui il avait promis le mariage. Là, cela ne peut pas être la vie du duc de Parme. De plus, presque 200 ans séparent Francesco Farnèse de Franchezzo Farnèse, d'autant qu'à un moment, l'esprit dit « souvenez-vous de la situation sociale et politique qui régnait en Italie dans la première moitié du XIXe siècle » indiquant clairement qu'il a vécu jusqu'en 1850 ou 1860.

Pourtant, la similitude de leurs prénoms, l'omniprésence d'un palais « dans ma jeunesse, j'avais souvent admiré ce palais magnifique. Je me sentais fier d'appartenir à une lignée qui avait autrefois possédé cet édifice ainsi que toutes les terres qui y étaient rattachées » , de leur idylle tardive et de leur mort soudaine dans les bras de leur bien-aimée laisse plus que songeur et on se demande dans quelle mesure l'aventure de Franchezzo signée par monsieur A. Farnèse ne serait pas la sienne ( une expérience qux frontières de la mort ? ) mélangée à la vie de Francesco, duc de Parme, revisitée... afin d'égarer les pistes.


Les Strates




Maison de l'Espoir 34

Confrérie de l'Espoir 34

Maison du Chagrin 35

Terres du Crépuscule 40

Troisième Cercle 40

Première Sphère 40

Contrée du Crépuscule 46

Terre de l'Inquiétude 46

Terre des Avares 46

Pays du Froid 52

Pays du Crépuscule 53

Terre de l'Aube 67

Pays de l'Aube 72

Pays de l'Esprit 72

Royaumes Infernaux 74

Terre des Horreurs 98

Deuxième Sphère 100

Confrérie de la Deuxième Sphère 100

Pays de l'Espoir 112

Pays du Remords 197

Pays du Matin 214

Pays du Repentir 214


« Dès qu'un esprit commence à penser, il cherche à acquérir des connaissances et se nourrit de tout ce qui lui tombe sous la dent »


~ 1

Après avoir traversé bien des zones, je peux avouer que je reviens vraiment de très loin. Dans vos langues ces zones ne possè­dent pas de nom puisqu'elles ne se trouvent nulle part. Aussi, en m'efforçant d'être aussi bref et clair que possible, j'aimerais vous raconter mon voyage dans l'au-delà afin que ceux qui s'apprêtent à prendre le même chemin que moi sachent ce qui les attend.


Durant mon existence terrestre, j'ai vécu comme tout le monde, passant ma vie à rechercher le plaisir. Et quand il m'arrivait d'être gentil, c'était toujours avec l'arrière-pensée qu'on devait l'être avec moi. Je pensais aussi qu'il me suffisait d'offrir des cadeaux à mon entourage pour obtenir l'amour et le respect dont j'avais besoin. En effet, la vie m'avait gâté aussi bien physi­quement qu'intellectuellement et dès ma plus tendre enfance, j'ai été adoré et encensé par mes proches. Résultat : l'idée ne m'est jamais venue qu'il puisse exister une forme d'amour où l'ego se sacrifierait totalement, un amour si désintéressé, si altruiste que nul autre bonheur ne peut être envisagé hormis celui de rendre quelqu'un d'autre heureux. Parmi toutes les femmes que j'ai aimées au long de ma vie ( à tort d'ailleurs puisqu'il ne s'agit que de passion ) , pas une seule n'a réussi à m'apprendre ce qu'était vraiment l'amour.

Et pourtant, en secret, je l'espérais. En vérité, ces femmes m'aimaient exactement comme moi je les aimais, ni plus, ni moins, et je ne recevais d'elles que l'équivalent de ce que je leur donnais. Ajoutons à cela que j'avais le monde à mes pieds : on m'appréciait car pour tous j'étais « quelqu'un »  on donnait des fêtes en mon honneur et je disposais même de courtisans. Bref, j'étais adulé, et je n'avais qu'à me pencher pour que les femmes tombent dans mon lit, ce qui me laissait toujours, après, un goût amer.

Puis arriva une période de ma vie sur laquelle je ne m'étendrai pas car je gâchai deux vies. On ne me tressa pas de couronne et il me fallut alors supporter le poids d'une lourde chaîne que je réussis à briser pour fuir et retrouver la liberté. La liberté ? Ah ! Plus jamais je ne devais être libre car nos erreurs nous poursuivent toujours, comme si pour le reste de notre vie nous étions des oiseaux aux ailes alourdies. Et cela ne s'arrête même pas à la mort, pas avant en tous cas d'avoir réparé nos fautes afin de les effacer de notre passé. Et c'est à ce moment-là, quand je me croyais à l'abri de l'amour, quand je pensais tout savoir de ce qu'une femme peut donner, que j'en rencontrai une. A mes yeux, il ne s'agissait pas d'une femme ordinaire, c'est pourquoi je l'appelai « le bon Ange de ma vie » .

Dès le premier instant, je me jetai à ses pieds et lui vouai tout l'amour dont mon âme était capable, un amour bien pauvre et égoïste comparé à ce qu'il aurait d- être, mais c'était tout ce que j'avais. Et je le lui offris complètement. Imaginez que pour la première fois de ma vie, je pensais à quelqu'un d'autre, plus qu'à moi-même ! Je faisais des rêves magnifiques, je me voyais libéré du poids de mon passé, alors que je continuais à y être enchaîné de la manière la plus dure et la plus terrible qui soit et ce, juste au moment où j'aspirais à une vie meilleure... Mais je m'éveillais toujours, saisi par la crainte que quelqu'un d'autre puisse me la prendre. Hélas, je ne pouvais pas dire un seul mot pour la retenir. J'étais conscient d'avoir édifié seul le mur qui nous séparait et je me sentais indigne de la toucher. Comment d'ailleurs, pou­vais-je oser l'épouser ? Parfois, l'espoir me susurrait que c'était possible, mais ma rai­son me disait le contraire. Bien qu'elle me manifestât son amour et sa tendresse, je savais, ou plutôt sentais, qu'elle ne serait jamais ma femme sur Terre. Alors je tentai de la quitter, mais sans conviction. Aussi, je me contentai du bon­heur procuré par sa présence.


J'étais heureux, tout simplement.


Et c'est là, sans aucun avertissement, sans aucun signe, que je fus brutalement arraché à la vie.


Mais je ne savais pas que j'étais mort ! Après plusieurs heures d'agonie, je sombrai dans un sommeil profond, sans rêves et lorsque je me réveillai, ce fut pour me retrouver seul, plongé dans l'obscurité15. Je pouvais me lever, bouger et je me sentais même mieux. Mais où étais-je ? Pourquoi étais-je dans le noir ? Pourquoi m'avait-on laissé sans lumière ? Je me levai et marchai à tâtons mais ne trouvai aucune lumière ni n'entendis aucun bruit. Seuls le silence et l'obscurité de la mort m'entouraient. Alors, j'ai essayé de trouver une sortie. Je pouvais me déplacer lentement. Combien de temps ? Je ne saurais le dire. Il me sembla néanmoins que des heures s'étaient écoulées, car ma terreur et mon malaise grandissaient. Je sentais qu'il me fallait absolument trouver un moyen de me sortir de ce lieu. Finalement, épuisé, je me mis à hurler. Mais aucune voix ne me répondit. A nouveau je criai, de plus en plus fort. Aucun écho, même en réponse à ma voix ne me réconforta. Et je repensai alors à celle que j'aimais, mais sentis comme une répugnance à prononcer son nom dans ce lieu. Je pensai alors à tous les amis que j'avais connus et les appe­lai. Mais pas un seul ne répondit. Est-ce que j'étais en prison ? Non, puisqu'une prison a des murs et cet endroit n'en avait pas. Etais-je deve­nu fou? Etais-je en plein délire? J'avais conscience de moi-même, je sentais mon corps, c'était le même... Vraiment le même ? Pas vraiment. Quelque chose avait changé. Je ne savais pas quoi, hormis l'idée qu'il s'était déformé d'une certaine façon.


Quand je passais les mains sur mon visage, mes traits me paraissaient plus grossiers, plus marqués. Une lumière ! N'importe quoi qui puisse me dire quelque chose ! J'étais vraiment seul ? Et elle, mon ange de lumière, où était-elle ? Avant que je ne m'endorme, elle était près de moi... J'avais l'impression que mon cerveau et ma gorge allaient éclater et me mis à hurler son nom. Qu'elle vienne au moins une dernière fois ! J'eus alors le sentiment effroyable de l'avoir perdue, mais conti­nuai à l'appeler comme un fou.


Et pour la première fois, j'entendis le son de ma voix résonner à travers cette horrible obscurité.


Devant moi, loin, loin devant, je distinguai un minuscule point lumineux, comme une étoile qui grandissait, grandissait et se rap­prochait de plus en plus pour s'arrêter devant moi : c'était une immense bulle de lumière en forme d'étoile16, à l'intérieur de laquelle se trouvait ma bien-aimée. Elle avait les yeux fermés comme quelqu'un qui dort. Mais elle me tendait les bras et j'entendis sa voix déli­cieuse, avec ces intonations que je lui connaissais si bien, me dire :

- Oh! mon amour, mon amour ! Où es-tu maintenant? Je ne peux pas te voir mais j'entends ta voix. Je t'entends m'appeler et mon âme te répond.

J'essayai de bondir vers elle mais une force invisible me retint car elle paraissait être entourée par un anneau que je ne pouvais franchir. En proie à la plus vive des souffrances, je m'effondrai, la suppliant de ne plus jamais me quitter comme cela. Il me sembla alors qu'elle perdait connaissance. Sa tête retomba sur sa poitrine et je la vis s'éloigner, flottant, comme soule­vée par des bras puissants. Après d'autres tentatives pour la suivre, je tombai et perdis connaissance.

A mon réveil, je fus rassuré de la trouver à nouveau à mes côtés. Elle était debout et avait son apparence normale. Sauf qu'elle était d'une pâleur extrême et toute vêtue de noir ! Tout était sombre, hormis cette faible lueur blafarde qui me permit de voir sa main tenant un bouquet de fleurs blanches. Ensuite, je la vis se pencher au dessus d'un monticule de terre fraîchement remuée. Je m'étirai afin de m'approcher et remar­quai qu'elle pleurait en silence, tout en déposant ses fleurs sur la terre. Et je l'entendis murmurer :

- Oh mon amour, tu ne reviendras jamais à mes côtés?

Sans pouvoir la toucher, je me mis, moi aussi, à genoux près d'elle et regardai le monticule, instantanément parcouru d'un frisson de terreur en réalisant que cet amas de terre était ma propre tombe.

.

~ 2

Je suis mort ! Je suis mort !  hurlai-je. Non, ce n'est pas possible ! Les morts ne ressentent rien. Ils retournent à la poussière, se décomposent, pourrissent. Tout est perdu pour eux et ils n'ont plus conscience de quoi que ce soit ! A moins que... A moins que l'âme ne survive... Les prêtres avaient eu beau me parler de cela, je les avais toujours traités d'imbéciles, d'aveugles et de cinglés. Selon moi, leurs discours ne servaient que leurs inté­rêts, car les hommes ne peuvent gagner le paradis qu'en franchissant une porte dont ils étaient les seuls à posséder les clés. Or ces clés, ils ne les actionnaient que moyennant finance, quand on les payait pour dire des messes à l'intention des morts. On racontait à de pauvres femmes, à des idio­tes apeurées, mais aussi à des hommes faibles d'esprit, d'horribles histoires d'Enfer et de Purgatoire qui les remplissaient de terreur et les amenaient à acheter ces privilèges illusoires qu'on leur promettait. Moi, je n'en voulais pas de leurs privi­lèges. De plus, je ne connaissais que trop bien les prêtres - et surtout leur vie intime- pour croire à leurs promesses de pardon, eux-mêmes étant incapables de pardonner.

J'avais toujours dit à qui voulait l'entendre que je regar­derais la mort en face. Et si ces prêtres avaient tort, qu'est-ce qui était vrai, alors ? Qui pouvait nous dire quelque chose à propos du futur ? Qui pou­vait nous dire si Dieu existe ? Pas les vivants qui se con­tentent d'échafauder des théories et des suppositions. Pas les morts non plus, personne n'étant jamais revenu pour raconter ce qui se passe chez eux. Et maintenant, c'est moi qui me tenais à côté de cette tombe, la mienne... C'est moi qui entendais ma bien-aimée dire que j'étais mort et la voyais jeter des fleurs sur ma dernière demeure.


Tandis que je regardais la terre compacte devenir transparente, je vis mon propre nom et la date de ma mort inscrits au bas du cercueil. Puis à travers le bois, j'entrevis la forme blanche et immo­bile que je savais être moi, couché à l'intérieur. Je fus même hor­rifié par un autre spectacle, celui de la décomposition répugnante de mon corps qui avait commencé. Il ne restait plus rien de ma belle stature, de mon corps, et bientôt même mes traits deviendraient méconnaissables. Et je me tenais là, tout à fait conscient, regardant alternativement ce corps puis en moi-même. Je sentais tous mes membres, tous les traits familiers de mon visage en les parcourant de mes mains. Je savais que j'étais mort et pourtant j'étais vivant ! Si la mort ressemblait à cela, alors les prêtres étaient sans doute dans le vrai. Les morts vivaient. Oui, mais où ? Et cette obscurité, était-ce l'Enfer ? Je ne pouvais pas être ailleurs. A une âme perdue comme la mienne, si éloignée de la spiritualité et de l'Eglise, on n'aurait pas pu trouver une autre place.

Entre l'Eglise et moi la rupture avait été totale, vous ne pouvez même pas imaginer à quel point je la méprisais. J'estimais qu'une organisation qui était au courant de la vie scandaleuse de beaucoup de ses dignitaires, et qui fermait ses yeux là-dessus, n'avait aucun droit à guider qui que ce soit dans sa vie spirituelle. En son sein, il y avait peut-être des hommes de bien, c'est vrai  crétins sans foi ni loi menant une vie honteuse. Et l'Eglise, elle qui prétendait par ailleurs servir d'exemple à l'Humanité tout entière et détenir la vérité, ne prononçait jamais d'exclusion... Mieux, elle leur offrait des promotions et les nommait à des postes plus élevés17. Quiconque a vécu en Italie et vu les effroyables abus commis par l'Eglise ne sera pas surpris de voir le peuple se révolter.


Souvenez-vous de la situation sociale et politique qui régnait en Italie dans la première moitié du XIXe siècle. Vous vous rappelez du rôle joué par l'Eglise catholique ? N'est-ce pas elle qui aida les occu­pants18 à affermir leur pouvoir, rendant l'oppres­sion du peuple italien encore plus dure ? Qui sait qu'on trouvait des espions partout ? Autant des prêtres que des laïcs ! Si bien qu'un homme n'osait même pas murmurer ses pensées à un proche, par crainte d'être dénoncé au prêtre puis au gouvernement. Les pri­sons étaient pleines à craquer, remplies de malheureux coupables seulement d'aimer leur pays et de haïr l'occupant. Mon attitude ne fut pas différente : je me révoltai et n'eus que mépris pour l'Eglise qui m'avait baptisé. Dans ces condi­tions, elle ne pouvait à présent m'offrir aucune place en son sein. D'ailleurs, si l'anathème jeté contre elle avait le pouvoir d'envoyer une âme en Enfer, à coup sûr c'est là que je me trouvais.

Et tout en ruminant ce genre de pensées, je posai de nouveau mon regard sur ma bien-aimée. Il fut clair qu'elle n'aurait jamais mis les pieds en Enfer, même pour m'y cher­cher. D'ailleurs, elle avait l'air d'être bien vivante et si elle était age­nouillée près de ma tombe, je me trouvais encore sur Terre. Mais alors, les morts ne quittent pas la Terre ? Jamais ? Ils restent là à planer ? Pendant qu'une foule de pensées se bousculaient sous mon crâne, je m'efforçai de me rapprocher d'elle. Mais la même barrière invisible m'en empêcha. Je pouvais simplement bouger autour d'elle. Alors je commençai à lui parler, à l'appeler par son nom, en lui disant que j'étais là, que j'avais toute ma conscience et que j'étais toujours le même, bien que mort. Mais elle ne paraissait pas m'entendre, ni me voir. En fait, elle pleurait toujours en silence, submergée par le chagrin. Elle continuait aussi à arranger les fleurs avec des gestes de tendresse, murmurant que je les avais tellement aimées et que je saurais qu'elle les avait mises là pour moi. De mon côté, je ne renonçais pas et continuais à lui parler, encore et encore, aussi fort que possible. Sans succès. Décidément, elle ne m'entendait pas. Il y avait tout de même une sorte de gêne dans ses mouvements et elle se passait la main au-dessus de la tête comme quelqu'un qui rêve. Finalement, elle s'éloigna à pas lents, remplie de tristesse.


J'essayai de la suivre, mais en vain. Je ne pouvais m'éloigner de ma tombe et du corps qui avait été le mien sur Terre que de quelques mètres et compris alors pourquoi. Une chaîne qui ressemblait à un cordon de soie noire, aussi mince qu'un fil d'araignée, me retenait à mon corps. Quand je bougeais, elle s'étirait. Ensuite, un autre phénomène com­mença à me gêner : je sentais les effets de la décomposition de mon corps !


C'est à ce moment-là qu'une voix semblant venir de quelqu'un plein de majesté me parla :

- Tu vois ce corps ? Tu l'as aimé plus que ton âme. Mais regarde-le. Vois-tu combien il était péris­sable ? Regarde maintenant ton corps spirituel : tu l'as privé de la nourriture dont il avait besoin, tu l'as main­tenu prisonnier et tu l'as négligé. Mesures-tu à quel point ta vie terrestre a appauvri ton âme au point de la rendre repoussante et difforme ? Pourtant, c'est elle qui est immor­telle, divine et destinée à survivre à jamais.


Et comme si on m'avait tendu un miroir, je me vis ! Quelle horreur ! Pas de doute, c'était bien moi, mais mon apparence était si différente, j'étais si laid avec tous ces défauts ! Chacun de mes traits était si horrible que j'eus un mouvement de recul. Je priai le Ciel que la terre s'entrouvre sous mes pieds et me mette pour toujours à l'abri du regard d'autrui. Plus jamais je n'appellerais ma bien-aimée. C'était mieux, beaucoup mieux comme ça. Qu'elle pense que j'étais mort et parti pour toujours ! C'était mieux aussi qu'elle con­serve seulement de moi un souvenir et qu'elle ne voie surtout jamais cet horrible changement. Je me trouvais au comble du désespoir et de l'angoisse. Je me mis alors à hurler, me donnai des coups et m'arrachai les cheveux sauvagement, tellement je me faisais horreur. Puis je sombrai, inconscient.


Je me réveillai. A nouveau, mon amie se trouvait là avec d'autres fleurs. Tout en les plaçant sur ma tombe, elle m'exprimait des pensées encore plus douces et tendres que la pre­mière fois. Moi, je tentai de me cacher. Mon attitude alla jusqu'à s'endurcir à son égard et je me dis « Mieux vaut la laisser pleurer celui qui est parti, plutôt que de lui faire savoir qu'il est toujours vivant ». Aussitôt après son départ, je la suppliai de revenir, de revenir à tout prix, même si elle devait découvrir ma nouvelle apparence. Oui, cela valait mieux que d'être abandonné ici et de ne plus la voir. Elle ne m'entendit pas davantage mais ressentit quelque chose car, de loin, je la vis s'arrêter et se retourner à demi comme pour revenir sur ses pas. Mais finalement elle continua et quitta le cimetière.

Elle revint encore deux ou trois fois et à chaque fois j'avais un mouvement de recul. Pourtant, à cha­que fois qu'elle partait, je sentais la même envie furieuse de la supplier de revenir et de la garder près de moi. Mais je ne l'appelais plus. Je savais à présent que c'est en vain que les morts appellent les vivants. Ainsi, pour le monde entier, j'étais mort ! Ce n'était que pour accomplir mon horrible des­tin que je continuais à vivre...

Je réalisais aussi que la mort n'est pas un sommeil éternel et paisible où l'on ne se souvient plus de rien. Il aurait mieux valu pourtant. Dans mon désespoir, je priai qu'un oubli total me fût accordé, sans y croire. Chaque jour - je sentais les jours passer - mon esprit s'éveillait de plus en plus et je voyais maintenant avec une nouvelle clarté les événe­ments de ma vie défiler devant mes yeux comme une longue procession. Au début, tout était vague, mais graduellement cela devint de plus en plus précis. Je courbais la tête, dévasté, impuissant et désespéré, car je sentais maintenant qu'il devait être trop tard pour réparer mes actes.

~ 3

J'ignore combien de temps cela dura, mais il me semblait que ça n'en finirait jamais. Plongé dans mon déses­poir, je restais là, assis, lorsque j'entendis une voix douce m'appeler et je la reconnus. Je me sentis poussé à me lever pour la suivre. La corde qui m'avait retenu sembla s'étirer au point que je ne la sentis plus jusqu'à me retrouver dans une chambre. J'avais du mal à voir mais la pièce m'était familière. Normal, puisque je me trouvais dans la maison de ma bien-aimée, précisément dans la chambre où j'étais mort. Une terrible nostalgie m'envahit en pensant aux jours heureux ensemble. Elle était assise devant son secrétaire, un crayon à la main et ne cessait de répé­ter mon nom :

- Toi que j'aime tant, si les morts ont la possibilité de revenir à la vie, fais-le, reviens vers moi. Si tu en es capable, essaie de me faire écrire quelques mots, ne serait-ce qu'un "oui" ou un "non" à mes questions.


Pour la première fois depuis ma mort, je vis un fai­ble sourire sur ses lèvres et dans ses yeux adorables, dont les paupières étaient pourtant lourdes à force d'avoir pleuré, brillait une lueur d'espoir. Mais comme son visage semblait pâle... Je ressentis toute la douceur de l'amour qu'elle m'avait donné... Puis je remarquai deux ou trois personnes debout à côté d'elle et je sus que c'étaient des esprits. Très différents de moi cependant. Ils resplendissaient. Ils irradiaient tellement que je pouvais à peine les regarder, car ils me brûlaient comme du feu. L'un d'eux était un homme, grand, calme, d'une apparence très digne, penché au-dessus d'elle pour la protéger, comme l'aurait fait son Ange gardien. A ses côtés, se tenaient deux jeunes gens très beaux. Au premier coup d'oeil, je compris que c'étaient ses deux frères dont elle m'avait si souvent parlé, morts dans la fleur de l'âge. Elle avait enfoui leur souvenir au fond de son coeur et avait toujours pensé qu'ils étaient devenus des anges. J'eus un mouvement de recul en les voyant, car j'avais le senti­ment qu'ils m'avaient eux aussi aperçu et je cherchai vainement à recouvrir mon visage et mon corps avec le curieux vêtement sombre que je portais. Puis ma fierté se réveilla et je dis:

- N'est-ce pas elle qui m'a appe­lé ? Comment ? Je suis venu et elle ne serait pas l'arbitre de ma destinée ? Tout est donc irrévocable ? Il n'y a vraiment rien que je puisse faire pour inverser le cours des choses ? Il n'y a donc aucun espoir au-delà de la tombe?

Une voix, précisément celle que j'avais entendue près de ma tombe, me répondit :

- Tu es en proie au cha­grin, mais penses-tu vraiment qu'il n'y a pas d'espoir sur Terre ? L'homme lui-même n'accorde-t-il pas son pardon à celui qui lui a fait du mal, pourvu que ce dernier regrette ce qu'il a fait et demande à être par­donné ? Et Dieu serait moins juste ? Eprouves-tu des regrets ? Regarde au fond de toi et vois si c'est pour toi-même ou pour les autres que tu as du chagrin.


Au moment où j'entendis ces paroles, je sus que je n'avais pas vraiment de regrets. Je me bornais à souffrir, je me conten­tais d'aimer et d'attendre. Alors, ma bien-aimée prit à nouveau la parole et me demanda si j'étais là et si je pouvais l'entendre et utiliser sa main pour écrire. Il me sembla que mon coeur remontait dans ma gorge au point de m'étouffer. Je m'approchai pour bouger sa main, pour la toucher, mais l'un des esprits s'interposa et me força à reculer en murmurant:

- Dis-moi ce que tu as à lui dire et je guiderai sa main. Je ferai cela dans son intérêt, au nom de l'amour qu'elle te porte.

Je fus submergé de bonheur. Effectivement, je lui aurais pris la main pour la couvrir de baisers. Il me sembla toutefois que son éclat brûlait la mienne et je ne pus la toucher plus longtemps. Je m'inclinai devant lui en pensant qu'il était vraiment un Ange. Ma bien-aimée reprit la parole et me demanda encore une fois si j'étais là. Alors je dis « oui » . L'esprit posa sa main sur celle de ma bien-aimée qui se mit aussitôt à écrire maladroitement « oui », comme un enfant qui apprend à écrire. Elle sourit et posa alors une autre question. Comme précédemment, sa main écrivit ma réponse. Elle me demandait ce qu'elle pouvait faire pour moi, si j'avais un souhait qu'elle pouvait réaliser. Je lui répondis « Non, non, pas pour l'instant » . En fait, je ne voulais pas la faire souffrir par ma présence. Je souhai­tais qu'elle m'oublie. Mais Dieu que sa réponse me fut douce :

- Ne me dis pas cela. Je serai toujours ton amie la plus fidèle et la plus chère, comme avant. Depuis ta mort, je n'ai eu qu'une seule pensée en tête, te retrouver.

Je lui répondis, ou plutôt je lui criai, que cela avait été également mon désir. Aussitôt, elle me demanda si je reviendrais. Je m'empressai de la rassurer. Où ne serais-je pas allé pour elle ? Que n'aurais-je pas fait ? Mais l'esprit resplendissant me dit qu'elle devait s'arrêter et guida sa main pour qu'elle l'écrive. Aussitôt je me sentis aspiré en arrière, forcé à rega­gner ma tombe et mon corps physique dans ce sombre cime­tière. Mais je n'éprouvais plus les mêmes sentiments, je n'étais plus si désespéré : en dépit de tout, une étincelle d'espoir avait jailli car je savais que je pourrais la revoir et lui parler.


Et c'est là que je découvris que les deux autres esprits, ses frères, m'avaient suivi. Ils me parlèrent mais je ne peux rapporter ici tous leurs propos. En résumé, ils m'expliquèrent qu'un gouffre me séparait de leur soeur et ils me demandèrent si je voulais assombrir sa jeune vie avec ma pré­sence ténébreuse. Si je la laissais, elle finirait par m'oublier. Si je l'aimais vraiment, je ne souhaitais certainement pas qu'elle demeure solitaire le reste de ses jours, par amour pour moi. Je leur dis que je l'aimais et que je ne pourrais jamais sup­porter de la laisser, pas plus qu'accepter que quel­qu'un d'autre puisse l'aimer. Alors ils abordèrent mon passé et me demandèrent comment je pouvais avoir l'audace de rester lié à une vie aussi pure que la sienne19. Comment pouvais-je espérer la retrouver après sa mort alors qu'elle appartenait à une sphère à laquelle je ne pou­vais prétendre avant longtemps. Ne serait-il pas mieux pour elle, et plus noble de ma part, une preuve même d'un amour plus sincère, de la laisser m'oublier et découvrir quel bonheur la vie pouvait encore lui offrir ? Je répondis faiblement que je pensais qu'elle m'aimait. Et ces deux êtres continuèrent :

- Oui, bien sûr, elle t'aime, mais c'est parce qu'elle t'a idéalisé dans son innocence. Penses-tu qu'elle t'aimerait si elle connaissait toute ton histoire ? Est-ce qu'elle ne se détournerait pas de toi avec horreur ? Dis-lui la vérité et donne-lui le choix de se libérer de toi. Tu seras plus noble et tu montreras la sincérité de ton amour. Si tu l'aimes, pense à elle, à son bonheur et cesse de ne penser qu'à toi.

Alors mon espoir s'évanouit. Je baissai la tête m- par un sentiment de honte et d'angoisse. Je savais que j'étais un pauvre type et qu'en aucune façon je n'étais digne d'elle. J'eus même la vision, comme dans un miroir, de ce que sa vie pourrait être si elle se libérait de moi. Elle pourrait par exemple ren­contrer quelqu'un de bien mieux et connaître avec lui le bonheur. Moi avec mon amour, je ne ferais que l'entraîner vers le bas et la plonger dans le chagrin. Pour la première fois de ma vie, l'occa­sion me fut donnée de faire passer le bonheur de quelqu'un d'autre avant le mien. Aussi, puisque je l'aimais vraiment, je leur dis :

- Eh bien, oui, dites-lui la vérité, et laissez-la me dire ne serait-ce qu'un seul mot en guise d'adieu. Et je partirai.

Aussitôt, nous nous retrouvâmes devant elle et je la vis épuisée par le chagrin. Je suppliai ses frères de me laisser lui donner un baiser, le premier et dernier depuis ma mort. Mais ils refusèrent, disant que c'était impossible car le seul fait d'être touchée par moi la tuerait. Ils la réveillèrent toutefois pour lui faire écrire ce qu'ils avaient à dire. J'entendis chaque mot tomber comme un clou planté dans le cercueil où ils enterraient à jamais mes derniers espoirs. Elle écrivit comme dans un rêve le récit de ma vie. Moi, je devais seulement lui dire qu'elle serait libérée de ma présence et de mon amour égoïste. Je lui dis donc adieu.

Ce mot était une goutte de sang s'écoulant de mon coeur. Mais sur le sien, cet adieu tomba comme un morceau de glace et le bri­sa. Je tournai alors les talons et m'en allai. Comment ? Je ne sais pas. Tandis que je m'éloignais, je sentis la corde qui m'avait rattaché à ma tombe et à mon corps physique se casser d'un coup. J'étais libre ! Enfin libre d'aller où je le voulais. Mais seul. Peu importe. Tandis que j'écris ces mots, mes yeux se remplissent de larmes de gratitude car elle, elle que nous avions jugée si faible au point de décider à sa place, elle me rappela avec toute la force d'un amour auquel nul n'osa s'opposer. Elle me rappela ! Pour me dire qu'elle ne pourrait jamais m'abandonner, aussi longtemps que je l'aimerais:

- Oublie ton passé. Tu peux tomber au fond de l'Enfer, je continuerai à t'aimer, à te suivre et à réclamer mes droits car mon amour pour toi m'autorise à t'aider, te réconforter et te chérir, jusqu'à ce que Dieu dans sa miséricorde te pardonne le passé et que tu sois à nouveau debout.

A ce moment-là, j'éclatai en sanglots comme peut le faire un homme fort, dur, dont le coeur a été meurtri et endurci  jour, il se sent tellement touché par la douceur et la tendresse qu'il laisse couler ses larmes afin de se sentir mieux. Je retournai auprès d'elle et m'agenouillai à ses côtés. Bien qu'on ne m'autorisât pas à la toucher, l'esprit magnifique et si serein qui veillait sur elle lui murmura que ses prières étaient exaucées et qu'elle devait désormais guider mon voyage de retour vers la Lumière. C'est ainsi que je la quittai, heureux. En partant, je vis la silhouette d'un Ange d'une blancheur immaculée lui donner force et réconfort. Un Ange au-dessus de celle qui était mon propre ange de lumière...


Après le court sommeil dans lequel ces esprits resplen­dissants l'avaient plongée, mon cher ange s'éveilla le jour suivant. Elle voulait rendre visite à un brave homme dont elle avait obtenu l'adresse et qui pouvait l'aider à m'atteindre par-delà la mort. Grâce à ses Anges, elle avait découvert cet homme, connu pour ses dons de médium et de guérisseur, et qui lui avait suggéré de me faire écrire. Mais cela, je ne l'appris que bien plus tard. A cette époque, je me sentais seulement appelé par sa voix qui exerçait sur moi un pouvoir hypnotique. Pour la suivre, je me retrouvai debout dans une petite chambre plongée dans l'obscurité, excepté là où se trouvait ma bien-aimée. C'était donc chez lui qu'elle s'était rendue et que sa voix m'avait attiré. Elle lui racontait la nuit précédente et expliquait à quel point elle m'aimait, et qu'elle serait heu­reuse de donner sa vie pour m'aider. Ce brave homme lui tint un discours si réconfortant et plein de bonté qu'à ce jour, je lui en suis toujours reconnaissant. Et il m'a donné, à moi aussi, tant d'espoir ! « Même si la mort brise les liens qui rattachent le corps physique à la Terre » lui dit-il, « nous étions toujours libres de nous aimer » . Et il lui revenait la tâche de me relever et de me donner de l'espoir de l'autre côté. Quel homme merveilleux ! Il m'aida ensuite à lui parler et à lui expliquer maintes choses, ce que je n'avais pas pu faire la nuit précédente, plein de tristesse et d'orgueil.

Avec quelle gentillesse il la calma ! Je l'en bénis encore plus que pour l'aide qu'il m'apporta. Quand finalement elle prit congé, je l'accompagnai à mon tour chez elle. Malheureusement, quand nous arrivâmes devant sa maison, je découvris qu'une nouvelle barrière avait été dressée non seulement par ses deux frères, mais aussi par d'autres à qui elle était chère. Désormais, un mur invisible l'entourait et je n'avais aucun pouvoir de le franchir. Je me dis que je devrais retourner chez le brave homme afin de lui demander s'il voulait bien m'aider et aussitôt je me retrouvai dans sa maison. Presque à la vitesse de la pensée20. Il décela immédiatement ma présence et, fait étrange, je découvris qu'il comprenait une grande partie de ce que je lui disais. Alors il me donna des explications supplémentaires et, pour peu que je sois patient, l'assurance que tout finirait par s'arran­ger avec le temps. Même si ses parents érigeaient un mur spirituel autour d'elle, son amour m'aiderait à le traverser n'importe quand car rien ne pourrait m'exclure de cet amour. Si j'acceptais d'apprendre tout ce qui concerne mon état et de travailler à mon avancement spirituel, le gouffre qui nous séparait finirait par se combler. Réconforté, je le quittai pour reprendre mon périple, je ne savais où.


Quoique faiblement, je commençais à être conscient d'autres êtres flottant tout près de moi, mais sans les voir vraiment. J'étais si perdu et si seul que je songeai même à retourner dans ma tombe, le seul endroit qui m'était vraiment familier. Aussitôt, ma pensée m'y ramena et je pus constater que les fleurs de mon ange étaient maintenant fanées. Toutefois, même desséchées, elles me parlaient de son amour. Aussi, je tentai d'en saisir une, une rose blanche, pour l'emporter mais je me rendis compte que je ne pouvais même pas la soulever. En fait, ma main passait à travers comme si cette rose n'avait été qu'un reflet dans une glace. Je me dirigeai alors vers une imposante croix en marbre blanc où je lus les noms de ses deux frères. Et je compris ce que son amour lui avait inspiré : m'enterrer à côté de ceux qu'elle avait le plus aimés !


J'en eus le coeur si retourné que je me remis à pleurer  la rosée, mes larmes coulèrent et emportèrent avec elles toute son amertume. Je me sentais cependant si seul que je finis par repartir pour me retrouver au milieu d'autres formes errantes. La plupart ne se retournaient même pas pour me regarder. Peut-être que, tout comme moi, elles n'étaient pas capables de voir, me dis-je. A cet instant cependant, trois formes qui ressemblaient à deux femmes et à un homme, s'approchèrent. L'homme me dit en me touchant le bras:


- Où vas-tu si vite ? Tu es certainement nouveau de ce côté-ci, sinon tu ne te dépêcherais pas ! Ici, personne n'est pressé car nous savons tous que nous avons l'éternité devant nous.

Il partit alors d'un éclat de rire qui me fit frissonner. Les deux femmes me prirent aussi les bras, en disant :

- Viens avec nous. Nous allons te montrer comment tu peux jouir de la vie même si tu es mort ! Nous n'avons plus de corps physique pour avoir du plaisir, mais nous pouvons en emprunter un à un mortel pour un petit moment. Viens, nous allons te montrer que le plaisir ne cesse pas avec la mort.

Dans ma solitude, j'étais terriblement heureux d'avoir quelqu'un à qui par­ler même s'ils avaient tous trois une apparence répugnante. Je les laissai m'emmener, pour voir, lorsque de loin, de très loin même dans cette immensité brumeuse, j'aperçus la forme spirituelle de mon amour, telle une image dessinée en traits de lumière sur un tableau noir. Elle avait les yeux fermés, comme la première fois que je l'avais vue, et me tendait ses mains. Sa voix semblait venir du Paradis :

- Fais attention, fais très attention, ne les suis pas. Leur route ne mène qu'à la destruction.

Puis la vision disparut et, comme dans un rêve, je me déga­geai du petit groupe pour me sauver dans l'obscurité. Je continuai ainsi, cherchant à fuir certains souvenirs qui me hantaient et il me semblait que l'espace tout entier était à ma disposi­tion. Finalement, je pris un peu de repos et au bout de quelques instants peu mesurables, je vis une lumière scintiller dans cette brume sombre. En m'approchant d'elle, je découvris un véritable flot de lumière : elle jaillissait d'une pièce, tellement brillante que mes yeux en furent éblouis. Face à ce rayonnement insoutenable, je décidai de repartir quand j'entendis une voix me dire :

- Ne t'en va pas. Ici, il n'y a que des esprits compatissants et des mains prêtes à t'aider. Si tu veux voir ta bien-aimée, entre, car elle est là. Tu vas pouvoir lui parler.

Je sentis alors une main qui passait mon manteau par-dessus ma tête pour me protéger de cette luminosité. On me con­duisit dans la pièce et l'on me fit asseoir dans un fauteuil. J'étais fatigué, tellement fatigué, et si heureux de pouvoir me reposer. Il régnait une telle paix qu'il me semblait avoir trouvé la route du Paradis. Quelques instants plus tard, je levai les yeux et vis deux femmes charmantes. Peut-être des Anges... Peut-être le Paradis. Je regardai encore et il me sem­bla avoir retrouvé toute ma vision, car derrière ces deux femmes blondes, je reconnus ma bien-aimée souriant avec tristesse, mais aussi avec tendresse, en direction de l'endroit où je me trouvais. Mais, je m'en rendis compte, elle ne me voyait pas réellement. Une des deux femmes en revanche le pouvait, et d'une voix grave et sereine, elle donnait à mon ange ma description.

Elle avait raconté à ces femmes son expérience, leur dévoilant ce qui lui semblait être un rêve étrange. Je lui aurais crié que j'étais là, que la vie continuait et que je l'aimais toujours. Mais je ne pouvais pas bouger. On m'avait jeté un sort et un pouvoir - que je ressentais faiblement - me retenait. A ce moment, les deux femmes prirent la parole et je sus qu'elles n'étaient pas des anges, mais bien dans leur corps physique. La voix qui m'avait donné l'ordre d'entrer me demanda à présent si j'aimerais qu'une des femmes écrive à ma place. Je dictai mon message et l'esprit guida sa main, répétant à mon amie que j'étais bien vivant, que je l'aimais, qu'elle ne devait ni m'oublier ni cesser de penser à moi car son amour m'était indispensable pour survivre, et que j'étais faible et impuissant, puisque je ne pouvais rien faire pour qu'elle me voie. Mon ange me répondit des mots si doux qu'ils devinrent sacrés, à jamais gravés dans mon âme.


Cette séance m'épuisa tant que je perdis connaissance et me retrouvai quelque part dans un état de sommeil absolu. Je ne sais pas combien de temps je dormis car à cette époque, je n'avais aucun moyen de mesurer le temps, sinon par la quantité de souffrances et de détresse que je vivais. Quand j'émergeai, mes sens étaient plus aiguisés : je pouvais par exemple me déplacer plus rapidement et j'avais l'impression que mon corps était plus robuste et mes mouvements plus libres. A présent, je sentais même l'envie de... manger, une sensation toute nouvelle. Ma faim grandit tant que je me mis en quête de quelque chose à manger. Pendant longtemps, je ne trouvai rien mais finis par décou­vrir quelque chose qui ressemblait à des miettes de pain rassis.

Puis-je dire ici que les esprits se nourrissent réelle­ment de la partie spirituelle, c'est à dire la partie éthérique, de ce que vous mangez, vous ? Ils ressentent réellement la faim, comme la soif. Toutefois, ce que nous man­geons et buvons demeure aussi invisible à vos yeux de chair que le sont nos corps spirituels. Si durant ma vie sur Terre j'avais été alcoolique ou amateur des plaisirs de la table, j'aurais ressenti la faim bien plus tôt. Mais j'avais toujours été sobre. Et si je me détournai avec dégoût de ces miettes, un petit moment de réflexion m'amena à la conclusion que je n'avais aucun moyen de me procurer autre chose. Je res­semblais à un mendiant et devais me contenter d'une ration de men­diant. Pourtant, mes pensées revinrent vers ma bien-aimée, et entraînèrent mon esprit à nouveau dans la pièce où je l'avais vue avec les deux femmes.

Cette fois-là, j'eus l'impression d'y entrer d'un coup et je fus accueilli par deux esprits masculins que je voyais à peine, mais je reconnus les deux femmes et ma bien-aimée, juste derrière elles. J'étais impatient de diriger moi-même sa main et d'écrire ainsi mon message. Mais cela ne fonctionna pas. Elle ne m'entendait pas. Déçu, je laissai alors la femme agir à ma place. L'un des deux esprits, un jeune homme sérieux et plein d'élégance me dit très calmement que si je voulais vraiment la faire écrire, il serait utile d'appartenir à un groupe qui m'enseignerait tout ce que j'ignorais encore comme par exemple la capacité de contrôler son esprit. Je pourrais ainsi obtenir le privilège d'être proche de mon amour pendant sa vie terrestre. Il s'agissait d'une voie dure avec de nombreux degrés, qui finirait par m'emmener dans une contrée où je pourrais enfin trouver la paix et le bonheur, un bonheur difficilement imaginable. Il me donna l'assurance, que mon corps difforme changerait au fur et à mesure que mon esprit se transformerait. En revanche, si je demeurais sur le plan terrestre comme maintenant, je ne manquerais pas d'être de nouveau attiré vers ces lieux de plaisirs que j'avais fréquentés et qui me feraient perdre tout pouvoir de me maintenir à proximité de mon amie. D'ailleurs, ceux qui la protègent se verraient obligés, pour son propre intérêt, de m'éloigner d'elle.

Je l'écoutai, étonné, avec le désir d'en savoir plus et lui demandai de me conduire vers ce groupe. Il m'expliqua que je ne devais m'y rendre que de mon plein gré :

- Dans le Monde de l'Esprit, tout le monde est libre, me dit-il. Chacun ne doit aller que là où ses désirs et ses souhaits le conduisent. Si tu étudies et cultives les désirs les plus élevés, les moyens te seront donnés pour atteindre tes objectifs et tu recevras autant d'aide et de force que nécessaire. Tu n'as jamais appris le pou­voir de la prière. C'est ce que tu vas faire à présent. Tout arrive avec une prière sincère. Que tu pries consciemment ou non, car tes désirs, bons ou mauvais, agissent comme des prières et attirent autour de toi, en réponse, des pouvoirs bons ou mauvais.

Comme je me sentais à nouveau épuisé, l'esprit me conseilla de ne pas me rendre près de mon amie pendant quelque temps car cela me permettrait de reprendre des forces et de progresser avec l'enseignement de la confrérie. Elle aussi en bénéficierait. Alors je formulai un voeu : si Dieu, que j'avais si longtemps oublié, se rappelait de moi et me pardonnait, je consacrerais ma nouvelle vie à réparer mes erreurs. Et c'est ainsi que je quittai le plan « terrestre » du monde astral pour un certain temps. En quittant la pièce en compagnie de mon nouveau guide, je me retournai vers mon amie et lui fis signe. Je demandai alors aux Anges et à Dieu, Lui que je n'osais prier pour moi, de la bénir et de la protéger pour toujours. La dernière chose que je vis, ce furent ses yeux qui me suivaient, remplis de tendresse, d'amour et d'espoir.


~ 4

Le Monde de l'Esprit comprend quantité de lieux étran­ges avec les scènes les plus étonnantes et une foule de groupes d'esprits spécialisés dans le secours aux âmes perdues et égarées. Le lieu le plus curieux reste bien la Maison de l'Espoir où je me suis retrouvé et qui était dirigée par la Confrérie de l'Espoir. A cause de la faiblesse de mes facultés psychiques, j'étais dans l'incapacité de voir véritablement à quoi ressemblait l'endroit, comme un aveugle sourd et muet. Par exemple, en compagnie d'autres esprits, j'avais du mal à les voir ou à les entendre, ou encore à me faire entendre. Sur le plan terrestre, je n'avais pas ressenti cela à un tel degré car, si tout y était som­bre, je pouvais voir et entendre suffisamment pour être con­scient des esprits qui m'entouraient. Ce n'est qu'en m'élevant de manière infime au-dessus du plan terrestre que je me rendis compte à quel point mon esprit était sous-développé.

Cette époque de ténèbres fut si horrible que, même maintenant, j'ai du mal à en parler. J'avais tellement aimé le soleil et la lumière ! Moi qui viens d'un pays qui n'est que soleil et splendeur. Or là, comme d'ailleurs partout depuis ma mort, je n'avais rencontré qu'obscurité et froid, avec une atmosphère lugubre, épou­vantable, gluante, qui enveloppait tout. Rien d'autre du reste n'aurait pu détruire mon esprit comme cette ambiance sinistre.

Sur Terre, j'avais été orgueilleux et hautain, refusant de courber l'échine devant qui que ce soit. Dans mes veines coulait le sang d'une famille fière d'appartenir à l'aristocratie. Par ma mère, j'étais lié aux « grands de la Terre », des êtres qui avaient eu pour ambition de soumettre des royaumes entiers. Mais à présent, le plus bas, le plus humble et le plus misérable des mendiants traînant dans une rue m'était supérieur car il jouissait malgré tout du soleil et de l'air pur. S'il n'y avait pas eu mon unique étoile, mon ange de lumière, et toutes les espérances qu'elle avait fait naître en moi avec son amour, je ne sais pas ce que j'aurais fait. Mais quand je songeais à elle et à la pensée qu'elle m'attendrait toute sa vie, mon courage renaissait. Je m'efforçais alors de supporter ma période de souffrances et de conflits inté­rieurs que je suis d'ailleurs bien incapable d'expliquer à qui que ce soit.

Impossible de distinguer en détails le lieu où je me trouvais. Cela ressemblait à une gigantesque prison aux contours flous, entourés de brume. Plus tard, je me rendis compte que c'était un immense bâtiment de pierres grises, aussi solides à mes yeux que des vraies pierres, avec de longs couloirs, des halls gigantesques, de vastes pièces et d'innombrables cellules minuscules sombres, meublées suc­cinctement. Chaque esprit ne possédait que ce qu'il avait gagné de par sa vie terrestre, et certains n'avaient rien d'autre que le petit lit sur lequel ils gisaient et souffraient. Car ici tout le monde souffrait. C'était la Maison du Chagrin. Pourtant c'était aussi la Maison de l'Espoir puisqu'on faisait tous des efforts pour accéder à la Lumière, en commençant par le premier degré de l'échelle de l'Espoir, celle-là même qui finirait, un jour, par nous monter au Paradis.



Dans la cellule que j'occupais, il n'y avait qu'une table, une chaise et un lit où je passais mon temps à me repo­ser et à méditer. Parfois, j'assistais dans le grand hall à des conférences, en compagnie d'autres esprits. Il s'agissait souvent de récits destinés à nous rappeler nos mauvaises actions. D'un point de vue impartial, on nous montrait la véritable portée de nos actes, tout, absolument tout, l'envers du décor, le point de vue de nos victimes21. Quand nous n'étions pas directement responsables de leur déchéance, le système social créé au service de nos intérêts égoïstes se chargeait de les achever. Puis on nous montrait comment réparer ces fautes... Après avoir vu les images de nous-mêmes - tels que nous étions, dépouillés de tous nos masques hypocrites terrestres - nous n'avions plus qu'à retourner dans nos cellules, honteux et confondus.

Réparer nos fautes consistait à sau­ver quelqu'un d'autre des erreurs que nous-mêmes avions commises. Les leçons avaient pour but de nous mener à l'étape suivante : être renvoyés sur Terre pour venir en aide, incognito, à des humains traversant les mêmes problèmes que nous. Quand nous n'assistions pas aux conférences, nous pouvions (suite dans le livre)




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1 Voir par les nombreux commentaires en notes de bas de page. Nos lecteurs sont d'ailleurs cordialement invités à les approfondir et à nous confier des commentaires supplémentaires ou manquants.

2 Le Canada a donné deux génies littéraires, Marshal Mac Luhan ( « La Galaxie Gutenberg » ) et Robertson Davies dont le « Un Homme remarquable » reste l'un des plus grands romans examinant le destin humain à la lueur de la présence de son Ange gardien.

3 Le rédacteur en chef d'un grand quotidien canadien est assassiné par l'amant de sa femme. Le mari, devenu fantôme à sa plus grande stupéfaction, décide de rendre leur liaison infernale. Traduit en français sous le titre « Fantômes et compagnie », Editions de l'Olivier.

4 Ed. Fayard, Paris, 1990 : « Je ne suis pas réveillé ce matin. Je suis mort. Ainsi commence le premier jour après moi »

5 Ed. Albin Michel, 1997 : « Je suis mort à sept heures du matin. Il est 8:28 sur l'écran du radio-réveil et personne ne s'en est rendu compte ».

6 On remarquera un autre genre littéraire découlant de celui-ci, le style « je suis mort, mais le lecteur ne l'apprend qu'au milieu ou à la fin du livre ». Dans ce style, personne n'a oublié le suédois « Monde de Sophie », le « Et si c'était vrai ? » de Marc Lévy ou plus récemment la « Nostalgie de l'Ange » d'Alice Sebold.

7 Ce film (avec l'acteur Robin Williams) est une adaptation du roman « What Dreams May Come » de Richard Matheson qui a amplement été inspiré par ce livre.

8 Ouvrage exceptionnel de Virginia Woolf racontant les diverses vies successives d'une âme qui s'incarne tantôt en homme, tantôt en femme tout en avançant dans le temps. Il a été écrit en 1927, trente ans après ce texte de Farnèse. Aujourd'hui, le style littéraire d'Orlando est tellement « lourd » que le livre (No 3002 en Livre de Poche) en est parfois presque indigeste. Pour ceux qui veulent malgré tout avoir une idée, nous ne pouvons que leur recommander le film « Orlando » réalisé en 1992 par Sally Potter avec l'actrice Tilda Swinton. On y remarque une apparition étonnante du chanteur mythique Jimmy Sommerville, du groupe « Bronski Beat » et « Communards », dans le rôle d'un Ange...

9 ( 1468-1549 ) Il a lancé la construction du palais Farnèse, aujourd'hui une Ambassade de France.

10 ( 1678-1727 ). On remarque aussi que depuis Allesandro ( le pape ), un seul autre Farnèse a porté le prénom de Francesco, le Cardinal Farnèse ( 1619-1647 ).

11 ( 1670-1748 )

12 Qui a utilisé Mr Farnèse comme médium pour raconter son histoire. Ce n'est certainement pas une coïncidence.

13 ( 1727-1731 )

14 Reine d'Espagne

15 Lire à ce sujet « Voie Express pour le Paradis » de Ned Dougherty, une expérience aux frontières de la mort d'un millionnaire américain foudroyé par une crise cardiaque devant sa boîte de nuit et qui raconte exactement la même chose, les mêmes sensations. Ed. Le Jardin des Livres, sortie en mars 2004.

16 Ned Dougehrty ( voir note précédente) raconte aussi la même chose, l'arrivée de cette étoile lumineuse.

17 Malgré les 107 années de distance, cette phrase garde tout son sens avec les histoires récentes de pédophilie : l'Eglise de France tout comme celle des Etats-Unis se contentait de muter ses prêtres d'une paroisse à une autre. Un prêtre américain, accusé de pédophilie dans les années soixante a ainsi parcouru plus de 50 paroisses, faisant toujours autant de victimes.

18 Les Autrichiens, puis les Français... En 1797, la République de Venise fut conquise par Napoléon qui finit par la donner à l'Autriche. Huit ans plus tard, Venise est rendue à Napoléon, puis reprise à nouveau en 1814. En 1815, les Autrichiens ajoutèrent à la République de Venise le royaume Lombard. En 1848, les Vénitiens se révoltèrent contre les Autrichiens et établirent une nouvelle République qui réussit à tenir 18 ans. En 1866, Venise fut intégrée une nouvelle fois au royaume dÆItalie né en 1861.

19 Ces esprits ont accès à l'intégralité de sa vie, exactement comme l'explique le Dr Morse avec son hypothèse des « champs morphiques ».

20 Phénomène classique du déplacement à la vitesse de la lumière que nous retrouvons dans toutes les expériences aux frontières de la mort.

21 Voir les livres « Voie Express pour le Paradis » et « La Divine Connexion », déjà cités dans lesquels on retrouve exactement la même précision.

12





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